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+++++ 1 – A l’époque, l’une des revendications principales des réformistes de gauche dans le Parti Travailliste portait sur la restriction des importations afin de « protéger l’industrie britannique » et les « emplois britanniques ». La tendance marxiste dans le parti et les auteurs de ce document n’acceptaient pas cette revendication aux connotations nationalistes, et expliquaient qu’elle provoquerait inévitablement des mesures de rétorsion de la part des pays concernés.
2 – « travailleurs
sans propriété » : il s’agit bien évidemment de la propriété des moyens
de production, et non pas celle des biens consommables, de maisons, de
voitures etc.
Ce texte a été rédigé par les marxistes britanniques Rob Sewell et Alan Woods, au début des années 1970.
Introduction
Sous
l’impact de la crise du capitalisme, de nombreux travailleurs
s’intéressent à l’économie. Ils veulent comprendre les forces qui
gouvernent leur existence. L’objectif de cette brochure est de leur
offrir, non pas un exposé complet de la théorie économique, mais une
introduction aux lois élémentaires du fonctionnement du système
capitaliste.
La
superficialité des économistes pro-capitalistes est révélée par leur
inaptitude à comprendre la crise qui frappe leur système. Leur rôle est
de dissimuler l’exploitation de la classe ouvrière et de « prouver » la
supériorité du système capitaliste. Mais leurs « théories » et «
solutions » ne peuvent rien face au pourrissement du capitalisme. Seule
la transformation socialiste de la société et l’introduction d’une
économie planifiée permettront d’en finir avec l’enfer du chômage, des
récessions et du chaos.
L’aile
droite de la direction du mouvement ouvrier a remplacé Keynes, son
vieil idole, par des solutions économiques « orthodoxes » : coupes
budgétaires, restriction des salaires et déflation monétaire. De leur
côté, les réformistes de gauche s’accrochent toujours aux politiques
capitalistes du passé – relance par la consommation, restriction des
importations1, etc. – qui ont déjà montré leur complète inefficacité.
Seule
une analyse marxiste du capitalisme permettra aux travailleurs
conscients de réfuter les mensonges des économistes bourgeois et de
combattre leur influence au sein du mouvement ouvrier.
Les conditions nécessaires à l’existence du capitalisme
La
production moderne est concentrée entre les mains d’entreprises
gigantesques. Unilever, ICI, Ford, British Petroleum : ces grandes
firmes dominent nos vies. Il est vrai qu’il existe de petites
entreprises, mais elles représentent le mode de production du passé, non
celui du présent. La production moderne est essentiellement massive, de
grande échelle.
Aujourd’hui, en Grande-Bretagne?,
200 entreprises et 35 banques (ou compagnies financières) contrôlent
l’économie du pays, réalisant 85% de la production nationale. Ce
développement s’est accompli au cours de ces derniers siècles à travers
une compétition impitoyable, des crises et des guerres. A l’époque où
les économistes classiques prédisaient l’essor du « libre commerce »,
Marx expliquait comment la concurrence déboucherait sur le monopole, les
entreprises les plus faibles étant éliminées.
De
prime abord, il pourrait sembler que la production de biens est avant
tout destinée à satisfaire les besoins de la population. C’est
évidemment une nécessité à laquelle doit répondre toute forme de
société, quelle qu’elle soit. Mais sous le capitalisme, les biens ne
sont pas simplement produits pour satisfaire des besoins : ils le sont
avant tout pour être vendus. C’est là la fonction essentielle de
l’industrie capitaliste. Comme le disait Lord Stokes, ancien président
de British Leyland : « Je fais de l’argent, pas des voitures ». C’est là
une expression parfaite des aspirations de l’ensemble de la classe
capitaliste.
Le
mode de production capitaliste suppose qu’un certain nombre de
conditions soient rassemblées. Tout d’abord, il faut qu’existe une large
classe de travailleurs sans propriété2, qui par conséquent sont obligés
de vendre leur force de travail pour vivre. Ceci signifie que, sous le
capitalisme, la conception libérale d’une « démocratie de propriétaires »
est une absurdité, car si la masse de la population possédait
suffisamment de propriété pour subvenir à ses propres besoins, les
capitalistes ne trouveraient pas de travailleurs pour générer leurs
profits.
Deuxièmement,
les moyens de production doivent être concentrés entre les mains des
capitalistes. Au cours de plusieurs siècles, les petits paysans et tous
ceux qui possédaient leurs propres moyens de subsistance furent
impitoyablement éliminés. Les capitalistes et les grands propriétaires
terriens firent main basse sur leurs moyens de subsistance, et
embauchèrent des travailleurs pour y travailler et créer de la
plus-value.
La valeur et les marchandises
Comment
le capitalisme fonctionne-t-il ? De quelle façon les travailleurs
sont-ils exploités ? D’où vient le profit ? Pourquoi y a-t-il des
crises ?
Pour
répondre à ces questions, il faut d’abord découvrir la clé du problème,
c’est-à-dire répondre à la question : qu’est-ce que la valeur ? Une
fois ce mystère élucidé, tout le reste en découle. Une compréhension de
ce qu’est la valeur est essentielle à l’intelligence de l’économie
capitaliste.
Pour
commencer, toutes les entreprises capitalistes produisent des biens ou
des services – ou plus exactement des marchandises, c’est-à-dire des
biens ou des services qui ne sont produits que pour être vendus. Bien
sûr, on peut produire quelque chose pour son propre usage personnel.
Avant l’avènement du capitalisme, c’est ce que faisaient beaucoup de
gens. Mais ces produits n’étaient pas des marchandises. Le capitalisme
se caractérise en premier lieu, selon l’expression de Marx, par une «
immense accumulation de marchandises ». C’est pour cette raison que Marx
a commencé ses recherches sur le capitalisme par une analyse des
caractéristiques de la marchandise.
Toute
marchandise a une valeur d’usage : elle est utile au moins à certaines
personnes (sans quoi elle ne pourrait être vendue). La valeur d’usage
d’une marchandise se limite à ses propriétés physiques.
Mais
en plus de cette valeur d’usage, toute marchandise a également une
valeur d’échange. Qu’est-ce que cette valeur et comment la
détermine-t-on ?
Si,
pour le moment, on fait abstraction de la question de l’argent, on
constate que les marchandises s’échangent suivant certaines proportions.
Par exemple :
Une paire de chaussures
ou
une montre
ou
trois bouteilles de Whisky
ou
un pneu de voiture = 10 mètres de tissu
Chacun
des biens de la colonne de gauche peut être échangé contre 10 mètres de
tissu. Suivant les mêmes proportions, ils peuvent également s’échanger
les uns contre les autres.
Ce
simple exemple montre que la valeur d’échange de ces différentes
marchandises exprime une équivalence de quelque chose qui est contenu en
elles. Mais qu’est-ce qui fait qu’une paire de chaussures = 10 mètres
de tissu ? Ou qu’une montre = 3 bouteilles de Whisky – et ainsi de suite
?
Il
est clair qu’il doit y avoir quelque chose de commun à ces différentes
marchandises. Ce n’est évidemment pas leur poids, leur couleur ou leur
consistance. Et encore une fois, cela n’a rien à voir avec leur utilité.
Après tout, le pain (une nécessité) a beaucoup moins de valeur qu’une
Rolls Royce (qui est un produit de luxe). Dès lors, quelle est la
qualité qui leur est commune ? La seule chose qu’ils ont en commun,
c’est le fait d’être des produits du travail humain.
La
quantité de travail humain contenu dans une marchandise s’exprime en
temps : semaines, jours, heures, minutes. Autrement dit, toutes les
marchandises citées dans notre exemple peuvent être exprimées en terme
de ce qu’elles ont en commun : le temps de travail. Soit :
5 heures (de travail) de chaussures
5 heures (de travail) de pneu
5 heures (de travail) de montre
5 heures (de travail) de Whisky
Le travail
Si
on considère les marchandises en tant que valeurs d’usage (en tant
qu’elles sont utiles), on les voit comme les produits d’un type de
travail particulier – le travail du cordonnier, de l’horloger, etc. Mais
dans l’échange, les marchandises sont considérées différemment. Leur
caractère spécifique est mis de côté et elles apparaissent comme autant
d’unités de travail en général, ou encore de « travail moyen ».
Il
est vrai que les marchandises produites par du travail qualifié
contiennent plus de valeur que celles produites par du travail non
qualifié. Par conséquent, dans l’échange, les unités de travail qualifié
se réduisent à tant d’unités de travail non qualifié. Par exemple, on
pourrait avoir le ratio : 1 unité de travail qualifié = 3 unités de
travail non qualifié. Autrement dit, suivant cet exemple, le travail
qualifié vaudrait trois fois plus que le travail non qualifié.
Ainsi,
la valeur d’une marchandise est déterminée par la quantité de « travail
moyen » nécessaire à sa production (soit le temps de travail qu’il faut
pour la produire). Mais si on en reste là, il pourrait sembler que les
travailleurs les plus lents produisent plus de valeur que les
travailleurs les plus efficaces !
Prenons
l’exemple d’un cordonnier qui, pour produire ses chaussures, utilise
les méthodes obsolètes du Moyen Age. Ce faisant, il lui faut toute une
journée pour fabriquer une paire de chaussures. Et lorsqu’il essaye de
les vendre sur le marché, il s’aperçoit qu’il ne peut pas en tirer plus,
en terme de prix, que des chaussures semblables produites par des
usines modernes et mieux équipées.
Si
de telles usines modernes produisent une paire de chaussure en, disons,
une demi-heure, elles contiendront moins de travail (donc moins de
valeur), et seront vendues à moindre prix. Dès lors, celui qui fabrique
ses chaussures semblables avec des méthodes médiévales sera bientôt
ruiné. Après une demi heure, le travail qu’il réalise pour produire ses
chaussures est du travail perdu, du travail non nécessaire dans le cadre
des conditions de production modernes. S’il veut échapper à la
faillite, il sera forcé d’adopter les techniques modernes et de produire
des chaussures en un temps au moins égal à celui développé par la
société.
A
chaque époque donnée, à laquelle correspond un « travail moyen »
déterminé par un certain niveau de la technique, des méthodes de
production, etc., toutes les marchandises exigent pour leur production
un temps donné. Ce temps est déterminé par le niveau de la technique
productive de la société à ce moment précis. Comme le disait Marx,
toutes les marchandises doivent être produites dans un temps de travail
socialement nécessaire. Tout temps de travail qui s’étend au-delà de ce
temps de travail socialement nécessaire sera du travail inutile, ce qui
provoque la hausse des prix et rend le produit concerné non compétitif.
En
somme, pour être précis, la valeur d’une marchandise est déterminée par
la quantité de travail socialement nécessaire qui y est incorporée.
Naturellement, ce temps de travail change continuellement, au fur et à
mesure que de nouvelles méthodes et techniques de travail sont
introduites. La concurrence ruine les producteurs dont la technique
n’évolue pas suffisamment vite.
Ainsi,
nous pouvons comprendre pourquoi les pierres précieuses ont davantage
de valeur que les marchandises du quotidien. Il faut davantage de temps
de travail socialement nécessaire pour trouver et extraire la pierre que
pour la confection des marchandises ordinaires. Sa valeur en est
d’autant plus grande.
Encore
une fois, une chose peut être une valeur d’usage sans avoir la moindre
valeur d’échange, c’est-à-dire une chose utile qui n’a demandé aucun
temps de travail nécessaire à sa production : l’air, les rivières, les
sols vierges, etc. Ainsi, le travail n’est pas la seule source de
richesse (de valeurs d’usages) : la nature en est une autre.
D’après
ce qui précède, on voit qu’une augmentation de la productivité, si elle
augmente le nombre de choses produites (la richesse matérielle), peut
réduire la valeur des choses en question – parce qu’elles contiendront
moins de quantité de travail. Ainsi, d’une augmentation de la
productivité résulte une augmentation de la richesse : avec deux
manteaux, deux personnes peuvent se vêtir, et seulement une avec un
manteau. Cependant, l’augmentation de la quantité de richesses
matérielles peut s’accompagner d’une chute de sa valeur d’échange, parce
qu’elle recèle moins de temps de travail socialement nécessaire.
L’argent
Historiquement,
du fait des difficultés liées à l’échange par le troc, un type de
marchandise donné était fréquemment utilisé comme « monnaie ». Au cours
des siècles, l’une de ces marchandises – l’or – s’est imposée comme l’«
équivalent universel ».
Au
lieu de dire que telle marchandise vaut tant de beurre, de viande ou de
tissu, elle est exprimée en termes d’or. Le prix est l’expression
monétaire de la valeur. L’or fut adopté comme équivalent universel du
fait de ses caractéristiques. Il concentre une grande valeur dans peu de
volume, peut être facilement divisé en quantités différentes, et est
également très résistant.
Comme
pour toute marchandise, la valeur de l’or est déterminée par la
quantité de travail qui y est incorporée. Disons, par exemple, qu’il
faut 40 heures de travail pour produire une once d’or. Dès lors, toutes
les autres marchandises nécessitant le même temps de production vaudront
une once d’or. Celles qui nécessiteront deux fois moins de temps
vaudront deux fois moins, etc. Ainsi :
Une once d’or = 40 heures de travail
1/2 once d’or = 20 heures de travail
1/4 d’once d’or = 10 heures de travail
Et donc:
Une mobylette (40 heures de travail) = une once d’or
Une table (10 heures de travail) = 1/4 d’once d’or
Du
fait des modifications permanentes de la technique et de l’augmentation
de la productivité du travail, les valeurs des marchandises ne cessent
de fluctuer. En ce qui concerne l’échange entre marchandises, l’or joue
le rôle de mesure. Ceci dit, bien qu’elle soit la plus stable, la valeur
de l’or est elle aussi en mouvement permanent, étant donné qu’aucune
marchandise n’a de valeur totalement fixe.
Le prix des marchandises
La
loi de la valeur gouverne le prix des biens. Comme expliqué plus haut,
la valeur d’une marchandise est égale à la quantité de travail qu’elle
contient. Et en théorie, la valeur est égale au prix. Cependant, en
réalité, le prix d’une marchandise tend à se situer au dessus ou au
dessous de sa valeur réelle. Cette fluctuation est provoquée par
différentes influences qui s’exercent sur les prix de vente, comme la
concentration du capital et le développement des monopoles. Les
fluctuations entre la demande et l’offre sont également un facteur
important. S’il y a un surplus de telle marchandise sur le marché, son
prix aura tendance à baisser en dessous de sa valeur réelle, alors qu’il
s’élèvera au dessus de cette valeur en cas de pénurie. Cela a mené les
économistes bourgeois à considérer que le rapport entre l’offre et la
demande était le seul facteur déterminant le prix d’une marchandise.
Mais ils étaient incapables d’expliquer pourquoi le prix fluctuait
toujours autour d’un certain point déterminé. Or, ce point n’est pas
fixé par l’offre et la demande, mais par le temps de travail nécessaire à
la production de la marchandise. Un camion vaudra toujours plus cher
qu’un sac plastique.
Le profit
Certains
« savants » défendent la théorie selon laquelle les profits viennent du
fait de vendre plus cher qu’on n’achète. Dans Salaire, Prix et Profit,
Marx explique le non-sens de cet argument :
«
Ce qu’un homme gagnerait constamment comme vendeur, il lui faudrait le
perdre constamment comme acheteur. Il ne servirait à rien de dire qu’il y
a des gens qui sont acheteurs sans être vendeurs, ou consommateurs sans
être producteurs. Ce que ces gens paient au producteur, il faudrait
tout d’abord qu’ils l’aient reçu de lui pour rien. Si un homme commence
par vous prendre votre argent et vous le rend ensuite en vous achetant
vos marchandises, vous ne vous enrichirez jamais, même en les lui
vendant trop cher. Cette sorte d’affaire peut bien limiter une perte,
mais elle ne peut jamais contribuer à réaliser un profit. »
La force de travail
Lorsqu’il
prend en considération les différents « facteurs de production »
relatifs à la marche de son entreprise, le capitaliste considère le «
marché du travail » comme une branche parmi d’autres du marché général.
Les compétences et les capacités des travailleurs ne sont pour lui que
des objets, des marchandises parmi d’autres. Ainsi, il embauche des «
bras ».
Ici,
il est nécessaire d’établir clairement ce que le capitaliste achète au
travailleur. En fait, ce dernier ne vend pas son travail, mais sa
capacité de travail – ce que Marx appelait sa force de travail.
La
force de travail est une marchandise dont la valeur est soumise aux
mêmes lois que celle des autres marchandises. Cette valeur est elle
aussi déterminée par le temps de travail nécessaire à sa production. Or,
la force de travail est la capacité à travailler du salarié. Elle est «
consommée » par le capitaliste au cours de la journée de travail. Mais
cela présuppose l’existence, la santé et la force du travailleur. Par
conséquent, la production de la force de travail signifie l’ « entretien
» du travailleur – et sa reproduction, qui fournit ainsi au capitaliste
une nouvelle génération de « bras ».
Ainsi,
le temps de travail nécessaire à l’entretien du travailleur – de son
aptitude à travailler – est égal au temps de travail nécessaire à la
production de ses moyens de subsistance et ceux de sa famille : la
nourriture, les vêtements, le logement, etc. La quantité que cela
représente varie selon les pays, les climats et les périodes
historiques. Ce qui suffit à la subsistance d’un travailleur de Calcutta
ne suffirait pas à celle d’un mineur gallois. Ce qui suffisait à la
subsistance d’un mineur gallois il y a un demi-siècle ne suffirait pas à
celle d’un métallurgiste de nos jours. A la différence des autres
marchandises, il entre ici un élément historique et même moral. Ceci
dit, dans un pays donné, à un stade donné de son développement
historique, un « niveau de vie » général s’établi. Soit dit en passant,
c’est précisément la création de nouveaux besoins qui est le moteur de
toutes les formes de progrès humain.
Escroquerie ?
A
une certain stade du développement de la technique capitaliste, en plus
de la reproduction quotidienne de la force de travail et de l’espèce
des travailleurs, le capitaliste doit également fournir de quoi assurer
aux salariés le niveau d’éducation requis par l’industrie moderne, ce
qui permet de maintenir et d’augmenter leur productivité.
A
la différence des autres marchandises, la force de travail n’est payée
qu’après avoir été consommée. Ainsi, avant de toucher leur paie à la fin
du mois, les travailleurs accordent pour ainsi dire un prêt gratuit aux
employeurs !
Mais
malgré cela, le travailleur n’est pas escroqué. Il a librement donné
son assentiment à l’accord trouvé. Comme c’est le cas de toutes les
marchandises, des valeurs équivalentes sont échangées : la marchandise
du travailleur, sa force de travail, a été vendue au patron au « prix du
marché ». Tout le monde est satisfait. Et si le travailleur ne l’est
pas, il est libre de partir et de trouver ailleurs du travail – s’il le
peut.
Ceci
dit, la vente de la force de travail pose un problème. Si « personne
n’est escroqué », si le travailleur reçoit, sous la forme du salaire, la
pleine valeur de sa marchandise, en quoi consiste l’exploitation ? D’où
vient le profit que réalise le capitaliste ?
L’explication
réside dans le fait que le salarié a vendu, non pas son travail (qui
est réalisé dans le processus du travail), mais sa force de travail – sa
capacité à travailler. Une fois que le capitaliste en a fait
l’acquisition, il est libre d’en user comme il l’entend. Comme
l’expliquait Marx : « Dès lors que le salarié entre sur le lieu de
travail, la valeur d’usage de sa force de travail, ainsi que son
utilisation, qui consiste en travail, appartient au capitaliste. »
La plus-value
Comme
nous allons le voir dans l’exemple suivant, la force de travail
qu’achète le capitaliste est la seule marchandise qui, lors de sa
consommation, produit un supplément de valeur au-delà de sa valeur
propre.
Prenons,
par exemple, un travailleur qui file du coton. Admettons qu’il est payé
5 euros de l’heure et travaille huit heures par jour. Au bout de quatre
heures, il a produit une quantité donnée de fil d’une valeur de 100
euros. Cette valeur de 100 euros peut être divisée ainsi :
Matières premières : 50 euros (coton, broche, électricité)
Détérioration : 10 euros (usage et déchirures)
Nouvelle valeur : 40 euros.
La
nouvelle valeur qui a été crée en quatre heures permet de payer le
salaire du travailleur pour les 8 heures de sa journée complète. A ce
stade, le capitaliste a donc couvert tous ses frais (y compris
l’intégralité de la « charge salariale ». Mais pour l’instant, aucune
plus-value (profit) n’a encore été créée.
Au
cours des quatre heures suivantes, le salarié va à nouveau produire 50
kilos de fil, d’une valeur de toujours 100 euros. Et à nouveau, 40 euros
de nouvelle valeur vont être créés. Mais cette fois-ci, les frais en
salaire sont déjà couverts. Ainsi, cette nouvelle valeur (40 euros) est
une « plus-value ». Comme le disait Marx, la plus-value (ou profit) est
le travail impayé de la classe ouvrière. De celle-ci proviennent la
rente du propriétaire terrien, les intérêts du banquier et le profit de
l’industriel.
La journée de travail
Le
secret de la production de plus-value réside dans le fait que le
travailleur continue de travailler longtemps après avoir produit la
valeur nécessaire à la reproduction de sa force de travail (son
salaire). « Le fait qu’une demi-journée de travail suffise à maintenir
le travailleur en vie ne l’empêche nullement de travailler la journée
entière. » (Marx)
Le
travailleur a vendu sa marchandise et ne peut se plaindre de la façon
dont elle est utilisée, pas plus que le tailleur ne peut vendre une
veste et demander à son client de ne pas la porter aussi souvent qu’il
le souhaite. Par conséquent, la journée de travail est organisée par le
capitaliste de façon à tirer le maximum de profit de la force de travail
qu’il a acheté. C’est là que réside le secret de la transformation de
monnaie en capital.
Le capital constant
Dans
la production elle-même, les machines et les matières premières perdent
leur valeur. Elles sont progressivement consommées et transfèrent leur
valeur dans la nouvelle marchandise. C’est clair dans le cas des
matières premières (bois, métal, pétrole, etc.), qui sont complètement
consommées dans le processus de production, pour ne réapparaître que
dans les propriétés de l’article produit.
Les
machines, par contre, ne disparaissent pas de la même manière. Mais
elles se détériorent au cours de la production. Elles meurent lentement.
Il est aussi difficile de déterminer l’espérance de vie d’une machine
que d’un individu. Mais de même que les compagnies d’assurance, grâce
aux moyennes statistiques, font des calculs très précis (et profitables)
sur l’espérance de vie des hommes et des femmes, de même les
capitalistes peuvent déterminer, par l’expérience et le calcul, combien
de temps une machine devrait être utilisable.
La
détérioration des machines, la perte quotidienne de leur valeur, est
calculée sur cette base et ajoutée au coût de l’article produit. Par
conséquent, les moyens de production ajoutent à la marchandise leur
propre valeur, au fur et à mesure qu’ils se détériorent au cours du
processus productif. Ainsi, les moyens de production ne peuvent
transférer à la marchandise davantage de valeur qu’ils ne peuvent
eux-mêmes en perdre dans le processus de production. C’est pourquoi on
les qualifie de « capital constant ».
Le capital variable
Alors
que les moyens de production n’ajoutent aucune nouvelle valeur aux
marchandises, mais ne font que se détériorer, la force de travail ajoute
de la nouvelle valeur par l’acte du travail lui-même. Si le processus
de travail s’arrêtait au moment où le salarié a produit des articles
d’une valeur égale à celle de sa force de travail (au bout de quatre
heures – 40 euros – dans notre exemple) la valeur supplémentaire créée
par son travail se réduirait à cela.
Mais
le processus de travail ne s’arrête pas là. Sinon, le gain du
capitaliste n’équivaudrait qu’au salaire qu’il doit verser au salarié.
Or les capitalistes n’embauchent pas des travailleurs par charité mais
pour faire des profits. Après avoir « librement » accepté de travailler
pour le capitaliste, le salarié doit travailler assez longtemps pour
produire une valeur supérieure à celle qu’il percevra sous forme de
salaire.
Les
moyens de production (machines, équipements, bâtiments, etc.) et la
force de travail – tous deux considérés comme des « facteurs de
production » par les économistes bourgeois – représentent les
différentes formes que prennent le capital original dans la deuxième
étape du processus de production capitaliste : argent (achat) –
marchandise (production) – argent (vente).
Les
économistes bourgeois considèrent ces facteurs comme équivalents. Le
marxisme, lui, fait la distinction entre la partie du capital qui n’est
marquée par aucun changement de sa valeur lors du processus de
production (les machines, les outils et les matières premières), à
savoir le capital constant (C), et la partie, représentée par la force
de travail, qui créé de la nouvelle valeur, c’est-à-dire le capital
variable (V). La valeur totale d’une marchandise est composée du capital
constant, du capital variable et de la plus-value, soit : C + V + MV.
Travail nécessaire et surtravail
Le travail effectué par les salariés peut être divisé en deux parties :
1. Le travail nécessaire. C’est la partie du processus de production nécessaire à la couverture des frais en salaires.
2. Le surtravail (ou travail impayé). C’est le travail effectué en plus du travail nécessaire, et qui produit le profit.
Pour
accroître ses profits, le capitaliste cherche toujours à réduire la
part des frais salariaux. Pour cela, il s’efforce, premièrement,
d’allonger la journée de travail ; deuxièmement, d’augmenter la
productivité (ce qui permet de couvrir plus rapidement le coût des
salaires). Troisièmement, il s’oppose à toute augmentation des salaires
et, quand l’occasion se présente, n’hésite pas de les réduire.
Le taux du profit
Dans
la mesure où tout le but de la production capitaliste est d’extraire de
la plus-value du travail de la classe ouvrière, le rapport entre le
capital variable (les salaires) et la plus-value (les profits) est d’une
grande importance. L’accroissement de l’une ou de ces deux valeurs ne
peut se faire qu’au détriment de l’autre. En dernière analyse,
l’augmentation ou la réduction de la part de la plus-value constitue
l’élément essentiel de la lutte des classes sous le capitalisme. C’est
une lutte pour le partage, entre les salaires et le profit, des
richesses créées.
Ce
qui importe au capitaliste, ce n’est pas tant le montant de la
plus-value que le taux de cette plus-value. Pour chaque euro de capital
qu’il investit, il attend le plus grand retour possible. Le taux de la
plus-value est le taux d’exploitation du travail par le capital. On peut
le définir comme Pv/V, où Pv est la plus-value et V le capital variable
– c’est-à-dire par le rapport entre le surtravail et le travail
nécessaire.
Par
exemple, dans une petite entreprise, supposons qu’un capital global de
500 euros se divise entre le capital constant (400 euros) et le capital
variable (100 euros). Mettons qu’à travers le processus de production,
la valeur des marchandises a augmenté de 100 euros.
Ainsi : (C+V) + Pv = (400 + 100) + 100 = 600 euros.
C’est
le capital variable qui est le travail vivant : c’est lui qui produit
la nouvelle valeur (la plus-value). Ainsi, l’accroissement relatif de la
valeur produite par le capital variable nous donne le taux de la
plus-value : Pv/V = 100 euros/100 euros, soit un taux de plus value de
100%.
La baisse tendancielle du taux de profit
Sous
la pression de la concurrence nationale et internationale, les
capitalistes sont constamment obligés de révolutionner les moyens de
production et d’accroître la productivité. Le besoin de s’agrandir les
oblige à consacrer une part toujours plus grande de leur capital dans
les machines et les matières premières, et une part toujours plus petite
dans la force de travail, ce qui diminue la proportion de capital
variable par rapport au capital constant. Avec l’automatisation et la
technologie industrielle vient la concentration du capital, la
liquidation des petites entreprises et la domination de l’économie par
des groupes gigantesques. Cela représente une modification de la
composition technique du capital.
Mais
dans la mesure où c’est seulement le capital variable (la force de
travail) qui est la source de la plus-value (le profit), l’augmentation
de l’investissement dans du capital constant débouche sur une tendance à
la baisse du taux de profit. Avec de nouveaux investissements, les
profits peuvent croître énormément, mais cette croissance tend à être
moins importante que celle des investissements.
Prenons
par exemple un petit capitaliste disposant d’un capital global de 150
euros qui se divise en 50 euros de capital constant et 100 euros de
capital variable. Il emploie 10 hommes à fabriquer des chaises et des
tables pour 10 euros la journée. Après une journée de travail, ils ont
produit une valeur totale de 250 euros.
Ainsi :
Capital variable (salaires) ou V : 100 euros
Capital constant (machines, équipement) ou C : 50 euros
Plus-value (profit) ou Pv : 100 euros
Le
taux de plus-value peut ainsi être calculé : Pv/V = 100/100 = 100%. Le
taux de profit, quant à lui, est le ratio entre la plus-value et le
capital global. Dans notre exemple, le taux de profit est donc :
plus-value (Pv)/capital global (C+V) = 100 euros/150 euros = 66,6%.
En
augmentant la part du capital constant, le taux de profit baisse. Dans
le même exemple, en gardant le même taux de plus-value, si on fait
passer le capital constant de 50 à 100 euros, on a un taux de profit de :
Pv/(C+V) = 100 euros/200 euros = 50%. Si on augmente jusqu’à 200 euros
le montant du capital constant, toutes choses égales par ailleurs, on a :
Pv / (C+V) = 100 euros/300 euros = 33,33% de taux de profit. Et ainsi
de suite.
Au
sujet de cette augmentation du capital constant, les marxistes parlent
d’« augmentation de la composition organique du capital », et
considèrent ce développement des forces productives comme un phénomène
progressiste. Cette tendance est donc ancrée dans la nature même du mode
de production capitaliste, et elle a été l’un des problèmes majeurs
auxquels les capitalistes ont eu à faire face pendant la période de
l’après guerre. La masse de la plus-value augmente, mais l’augmentation
du capital constant est proportionnellement plus importante. Il en
résulte une baisse du taux de profit. Les capitalistes n’ont cessé
d’essayer de surmonter cette contradiction au moyen de l’aggravation de
l’exploitation des travailleurs – ce qui augmente la masse de plus-value
et par conséquent le taux de profit – par d’autres moyens que
l’investissement. Pour ce faire, ils accroissent l’intensité de
l’exploitation de diverses façons, par exemple en augmentant la vitesse
des machines, en augmentant la charge de travail de chaque salarié ou
encore en rallongeant la journée de travail. Une autre façon de
restaurer le taux de profit consiste à ramener les salaires des
travailleurs en dessous de leur valeur nominale (par la dévaluation de
la monnaie, par exemple).
Les
lois mêmes du système capitaliste gênèrent d’énormes contradictions. La
course au profit à laquelle se livrent continuellement les capitalistes
donne une impulsion à l’investissement, mais l’introduction de
nouvelles technologies augmente le chômage. Cependant, paradoxalement,
la seule source de profit réside dans le travail des salariés.
L’exportation du capital
Le
stade suprême du capitalisme – l’impérialisme – est marqué par une
exportation massive de capital. La recherche de plus grands taux de
profit pousse les capitalistes à investir d’énormes sommes d’argent à
l’étranger, dans des pays où la composition du capital est plus faible.
Finalement, comme le prévoyaient Marx et Engels dans le Manifeste du
Parti Communiste, le mode de production capitaliste a fini par
s’entendre au monde entier.
L’une
des contradictions majeures du capitalisme réside dans le problème
évident que la classe ouvrière, en tant que consommatrice, doit pouvoir
racheter ce qu’elle a produit. Mais dans la mesure où elle ne reçoit
pas, sous la forme du salaire, la pleine valeur de son travail, elle
n’en a pas les moyens. Les capitalistes cherchent à résoudre cette
contradiction en réinvestissant de la plus-value dans les forces
productives. Ils s’efforcent également d’écouler leur excédent sur le
marché mondial, en concurrence avec les capitalistes des autres pays.
Mais il y a des limites à cela, puisque tous les capitalistes de la
planète se livrent au même jeu. Enfin, les capitalistes encouragent le
crédit, à travers le système bancaire, de façon à augmenter
artificiellement le pouvoir d’achat de la population et stimuler ainsi
la vente des marchandises qui, autrement, n’auraient pas trouvé preneur.
Mais à cela aussi il y a des limites, les crédits devant finalement
être remboursés – avec en prime les intérêts.
Cela
explique pourquoi, périodiquement et de façon régulière, les phases de
croissance sont suivies par des périodes de récession. La lutte
fiévreuse pour de parts de marché provoque une crise de surproduction.
Le caractère destructeur de ces crises, qui s’accompagnent d’une
destruction massive de capital accumulé (fermeture d’usines, abandon de
secteurs d’activité), est une indication suffisante de l’impasse dans
laquelle se trouve le système capitaliste.
Tous
les facteurs qui ont mené à la croissance d’après guerre ont en même
temps préparé la voie aux crises et aux récessions. Ce qui caractérise
l’époque actuelle, c’est la crise organique qui frappe le système
capitaliste. Si le capitalisme n’est pas éradiqué, à un certain stade,
la classe ouvrière fera face à une crise du type de celle de 1929.
L’humanité ne peut éviter le chaos, les gaspillages massifs et la
barbarie inhérents au capitalisme qu’en renversant ce système
anarchique. En éliminant la propriété privée des moyens de production,
la société pourra échapper aux lois du capitalisme et se développer
d’une façon rationnelle et planifiée. Les gigantesques forces
productives accumulées dans le cadre du système capitaliste
permettraient d’en finir une fois pour toutes avec ce scandale que sont
les crises de surproduction dans un monde ravagé par la faim et les
pénuries. L’élimination de la contradiction entre, d’une part, le
développement des forces productives, et, d’autre part, l’Etat-nation et
la propriété privée des moyens de production, poserait les bases d’une
planification internationale de la production.
Sur la base du socialisme ( AJH: Et je rajoute: du sociétalisme),
grâce à la science et la technologie modernes, le monde entier pourrait
être transformé en l’espace d’une décennie. La transformation
socialiste de la société est la tâche la plus urgente de la classe
ouvrière mondiale. Une compréhension de la théorie économique de Marx
constitue une arme indispensable dans la lutte pour le socialisme en
Europe et dans le monde entier.
par : Rob Sewell et Alan Woods
+++++ 1 – A l’époque, l’une des revendications principales des réformistes de gauche dans le Parti Travailliste portait sur la restriction des importations afin de « protéger l’industrie britannique » et les « emplois britanniques ». La tendance marxiste dans le parti et les auteurs de ce document n’acceptaient pas cette revendication aux connotations nationalistes, et expliquaient qu’elle provoquerait inévitablement des mesures de rétorsion de la part des pays concernés.
Je suis ici pour partager mon témoignage de ce qu'une bonne société de prêt de confiance a fait pour moi. Je m'appelle Nikita Tanya, de Russie et je suis une charmante mère de 3 enfants.J'ai perdu mes fonds en essayant d'obtenir un prêt, c'était si difficile pour moi et mes enfants, je suis allé en ligne pour demander une aide au prêt, tout espoir était perdu jusqu'à un jour fidèle où j'ai rencontré mon ami qui a récemment obtenu un prêt de Le_Meridian Funding Service.Elle m'a présenté cette honnête société de prêt qui m'a aidé à obtenir un prêt dans les 5 jours ouvrables.Je serai toujours reconnaissant à M. Benjamin, pour m'avoir aidé à me remettre sur pied. Vous pouvez contacter M. Benjamin par e-mail: lfdsloans@lemeridianfds.com, ils ne savent pas que je le fais pour eux, mais je dois le faire parce que beaucoup de gens ont besoin d'une assistance de prêt s'il vous plaît venez dans cette entreprise et soyez sauvé. WhatsApp: (+ 1 989-394-3740)
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